Qui n’a jamais entendu parler du poisson rouge?
Et pour cause, le poisson rouge est l’animal de compagnie le plus répandu en France et même au monde…
Originaire des régions tempérées d’Asie centrale et orientale, il est considéré comme une espèce mutante du ‘carassin’ de Chine. Bien que certains spécimens sauvages soient naturellement colorés, les variétés que nous connaissons aujourd’hui sont issues d’une longue série de sélection. Elles n’ont plus grand chose à voir avec son ancêtre, généralement de couleur gris doré, proche du carassin commun.
Le Carassius auratus se rencontre à l’état naturel du bassin du fleuve Amour en Russie jusqu’au Fleuve Rouge (Yuan Jiang) au Viêt Nam. Malgré sa large implantation au Japon depuis plusieurs siècles, l’espèce n’y est pas autochtone.
Le poisson rouge a une place importante dans la mythologie chinoise et dans les mœurs d’Asie orientale. Avec le temps, il a été très largement diffusé dans le monde comme poisson d’ornement.
A l’origine…
Les premières allusions faites à propos du poisson rouge proviennent du Shanhaijing, le «livre des monts et des mers», un recueil de données géographiques et de légendes de l’antiquité chinoise. Elles ont été écrites pendant la période des «Royaumes combattants» et le règne de la dynastie Han (-200 à 200 ap. J-C).
Plusieurs observations furent attestées pendant le règne de la dynastie Chun entre 265 et 415. Zhejiang, une province côtière de l’est de la Chine, est considérée comme le berceau du poisson rouge. Elle se situe non loin du fleuve bleu, le Yangzi Jiang.
De cette période proviennent les premiers témoignages d’observation de Carassius auratus au patron d’or. L’espèce est alors occasionnellement introduite dans les bassins des aristocrates de l’époque.
Au cours des années qui suivirent, pendant la dynastie Tang (618-907), une succession de sélections permit la création d’une première variété stable de poisson rouge, proche du poisson que nous connaissons actuellement. L’espèce n’est cependant pas très courante.
L’aquaculture s’intensifie progressivement pendant la dynastie Song (960-1279). En 1162, un étang à poisson d’or est construit à proximité du palais de l’empereur Song. Les efforts de collecte sont concentrés autour des poissons «rouges» et des poissons «or». Un protocole d’élevage est établi et le développement des méthodes de nutrition (verres de vase..) prennent leur essor.
Pendant la dynastie des Song, l’étang a une place prépondérante dans la religion bouddhiste. Les premières variétés de poisson rouge ont été créés et diffusées comme poisson d’ornement dans les bassins des temples. Un premier inventaire des nouvelles variétés est rédigé en 1276.
C’est surtout pendant la dynastie des Ming (1368-1644) que de nombreuses nouvelles variétés sélectionnées du Carassius auratus sont créées.
L’empereur Wanli est connu pour être un fin connaisseur de poissons rouges. Un des tous premiers bocaux à poisson rouge est installé au palais de la dynastie Ming. Le développement par la suite de l’élevage en intérieur a permis la création et le maintien de nouvelles variétés plus fragiles. A cette période apparaissent les premiers spécimens de poissons à double queue ainsi que les premières variétés aux yeux ‘télescopes’.
La notoriété du Carassius auratus est telle que la conception d’une partie du mobilier de la haute aristocratie est inspirée de la physionomie des poissons rouges. Durant cette période, le poisson rouge est synonyme de prospérité, de bonne chance et de fortune. Son motif est largement répandu dans les soieries, les céramiques et les sculptures.
Les japonais prennent connaissance de l’existence du poisson rouge autour de 1200. Le début de son introduction sur l’archipel surgit quelques décennies plus tard à l’époque de Muromachi (1336-1573). En 1502, un premier lot de poisson rouge est officiellement expédié au Japon par la dynastie Ming. Les premières piscicultures japonaises sont lancées au début de l’époque d’Edo (1600-1863). A cette époque, le maintien d’un poisson rouge en aquarium reste un luxe réservé à une élite.
Un riche marchand, Yodo-ya Tatsugoro décide de développer la propagation du poisson rouge comme animal de compagnie chez les gens ordinaires. Les formes de vente sont étoffées avec, entre autre, la possibilité de pêcher son poisson. Une tarification officielle est instaurée. L’expansion du poisson rouge durant toute cette période est fulgurante. Un certificat d’élevage est créé avec un certain nombre de règles concernant sa nutrition et son maintien. Les premiers élevages dans la population modeste ont lieu dans la fameuse boule en verre mais également dans des poteries, des baignoires ou encore des «braséros».
Les premiers poissons rouges expédiés en Europe arrivent au Portugal en 1611, date à laquelle les premiers élevages européens sont lancés.
En 1759, Le poisson rouge est officiellement décrit dans le monde occidental par le naturaliste suédois Carl von Linné (ou Linnaeus) sous le nom de Cyprinus auratus, genre auquel appartient également la carpe commune. La seconde partie du nom de l’espèce, ‘auratus’ signifie en latin ‘ recouvert d’une couche d’or’. Il est reclassé en 1949 sous le genre Carassius car il possède plusieurs caractéristiques notables qui diffèrent des espèces du genre Cyprinus (absence de certains barbillons…).
Il arrive en 1874 aux Etats-Unis où il suscite un fort engouement au sein de la population.
Durant la révolution culturelle chinoise de 1966, le «poisson rouge» est durement critiqué et attaqué. Il constitue un symbole fort de la «vieille culture» et tombe rapidement en désuétude. De nombreuses piscicultures sont détruites. Durant cette période, les poissons rouges sont tués en grand nombre dans les bassins et les aquariums sont abandonnés.
En France
Le poisson rouge arrive sous le règne de Louis XV en 1755 par l’intermédiaire de Madame de Pompadour qui en fit une véritable icône à la cours du roi.
Comme dans de nombreux pays européens, l’essor du poisson rouge fut fulgurant. Il entre dans la culture populaire française dès la fin du XIXe siècle.
A propos de l'auteur
Benoit Chartrer est un membre fondateur et pilote le projet Fishipédia. Sorti d'une formation d'ingénieur en physique, il a progressivement changé de spécialisation en se tournant vers les technologies Web. Passionné de voyage et de biologie, il tient également un compte Instagram dédié à la photographie animalière.